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Harcèlement moral : la Cour de cassation s’en remet à l’appréciation souveraine des juges du fond

Les Hauts Magistrats ne contrôleront plus l’appréciation faite par les juges du fond d’une situation susceptible de caractériser un harcèlement moral. A condition toutefois que ces derniers aient scrupuleusement respecté le régime probatoire applicable en la matière.

Dans une décision du 27 octobre 2004, la Cour de cassation avait considéré qu’elle n’avait pas à contrôler l’appréciation faite par les juges des éléments produits par les parties pour établir l’existence d’un harcèlement, estimant qu’une telle appréciation relevait de leur pouvoir souverain.

Mais, en 2008, « devant la montée en puissance de ce contentieux sensible », il lui était néanmoins apparu nécessaire de renforcer la nature de son contrôle (décision du 24/09/2008). Depuis, la Cour de cassation veillait donc à ce que les cours d’appel respectent rigoureusement les règles édictées à l’article L. 1154-1 du code du travail, notamment en ce qui concernait l’établissement, par le salarié, des faits laissant présumer un harcèlement et les éléments apportés par l’employeur pour contrecarrer cette présomption. Elle exercerait désormais un contrôle de qualification sur l’existence ou non du harcèlement moral invoqué par le salarié tout en affinant le régime probatoire du harcèlement, en imposant notamment aux juges du fond d’apprécier, dans leur ensemble, et non pas pris séparément, les éléments établis par le salarié.

Dans un arrêt du 8 juin 2016, la Cour de cassation rappelle et précise le régime probatoire du harcèlement: « pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral (…) ; dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ».

Mais surtout, elle semble abandonner le contrôle de la qualification de celui-ci, estimant que « sous réserve d’exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement ».
En l’espèce, elle considère « qu’après avoir exactement rappelé le mécanisme probatoire prévu par le code du travail, la cour d’appel, qui sans se contredire, a souverainement retenu que la salariée établissait des faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral mais que l’employeur justifiait au soutien de ses décisions d’éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, a décidé, dans l’exercice des pouvoirs qu’elle tient du code du travail, qu’aucun harcèlement moral ne pouvait être retenu ».
Ainsi l’appréciation des différents éléments produits par les parties ne sera-t-elle plus remise en cause par la Cour de cassation, dès lors que les règles probatoires issues du code du travail et les principes jurisprudentiels édictés en la matière ces dernières années auront bien été respectés.

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