Un employeur ne peut pas licencier un salarié en se fondant sur la seule clause du contrat de travail qui prévoit que le retrait du permis de conduire constitue d’emblée une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Cour de cassation 12 février 2014

L’employeur ne peut pas, dans le contrat de travail, prévoir qu’un événement quelconque constituera automatique- ment une cause de licenciement. Telle est la position de principe adoptée par la Cour de cassation dans un arrêt du 14 novembre 2000, dans lequel elle condamne clairement toute clause résolutoire qui serait insérée dans un contrat de travail, par laquelle un employeur pourrait se pré-constituer à l’avance un motif de licenciement dont le caractère réel et sérieux ne pourrait être remis en cause par le juge en cas de contentieux.

C’est pourtant ce qu’avait fait un employeur qui avait inscrit dans le contrat d’un de des salariés, commercial itinérant, que le retrait du permis de conduire, nécessaire pour les fonctions exercées par celui-ci, constituerait ipso facto une cause réelle et sérieuse de licenciement. Devant la cour d’appel d’Amiens, le salarié s’était vu débouté de son action visant à contester son licenciement. Les juges avaient admis que, même si la suspension du permis était intervenue à la suite d’une infraction commise à l’occasion d’un déplacement privé, le dimanche, avec son véhicule professionnel, ceci constituait un trouble objectif au fonctionne- ment de l’entreprise, notamment parce que sans son permis de conduire, le salarié ne pouvait plus exécuter son contrat de travail aux conditions convenues.

En effet, la Cour de cassation admet que lorsque le salarié est tenu de posséder le per- mis de conduire pour travailler, la perte ou la suspension de ce permis ne permet plus au salarié d’exécuter ses fonctions dans les conditions impliquées par son contrat. Le licencie- ment (non fautif) peut alors être prononcé. Mais ce n’est pas sur ce terrain que la Cour de cassation va statuer pour remettre en cause la décision de la cour d’appel. C’est la motivation même de la lettre du licenciement – et partant la justification du licenciement – qui est en cause. En effet, rappelle la Cour de cassation, la lettre de licencie- ment fixe les termes et les limites du litige. Par ailleurs, insiste-t-elle, « aucune clause du contrat ne peut valable- ment décider qu’une circonstance quelconque constituera en elle-même une cause de licenciement ».

Or en l’espèce, souligne-t-elle, le licenciement du salarié « était motivé exclusivement par l’application de l’article 10 du contrat ». L’employeur aurait pu justifier le licenciement par le retrait du permis de conduire, mais en invoquant le trouble au fonctionnement de l’entreprise qui en était résulté, et non pas en se contentant de renvoyer à une clause générale du contrat de travail prévoyant la rupture de ce dernier en cas de retrait de permis quelles qu’en soient les circonstances. Car en l’espèce, la motivation du licenciement n’existait pas. La seule référence à la clause résolutoire du contrat, prohibée par la jurisprudence, ne saurait suffire à justifier la rupture du contrat.

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